14 février 2014

DeeDee ou le Sex-appeal des défaillances

                                                                                                             

                                                                                                     [Photo par Léa Jiqqir]

Qu'est-ce que le charme ?

Une vibrance indéfinissable ? 

Une lumière dont la source n'est pas identifiable ?
Un joli mirage ?
L'excuse qu'utilisent les moches pour justifier l'affront visuel qu'ils constituent ?

Posons la question autrement. Tu choisis quoi entre un mégabeaugosse dont le regard possède une vacuité proche de celle d'un trou noir, et un type au physique imparfait mais plein de vie et de singularité ? Ashton Kutcher ou Michael Cera ? L'ennui ou la dinguerie ?


Meuf, si tu fais le choix du sex symbol lisse et creux, ne viens pas te plaindre si ta vie sexuelle est plus plate que Keira Knightley et que tu t'amuserais sans doute plus dans la salle d'attente du dentiste en patientant pour te faire enlever tes dents de sagesse.


Et vous messieurs, auriez-vous plus d'appétit pour la bombasse dramatiquement fade, ou pour la fille sur laquelle vos potes ne se retourneront pas mais dont l'esprit, l'expressivité, l'unicité piqueront votre attention ? Ok, bon en réalité 95% des mecs choisiront la sex-symbol ennuyeuse, l'exemple ne sert pas vraiment ma démonstration.


Mais l'idée est là. Le charme peut naître de n'importe quoi. Il ne peut se détecter qu'avec des yeux intrigués, bienveillants, subtils. Il se trouve quelque part au-delà de la beauté, au-delà de l'intelligence. C'est un morceau d'âme offert au regard de celui qui sait le voir. Le charme peut se manifester dans le charisme, la puissance, l'éclat...


Mais le type de charme le plus excitant, c'est celui des défauts.


Une voix surprenante, des oreilles légèrements décollées, un tic de langage qui retient l'attention, une lenteur astrale dans les gestes, une bouche trop grande, trop petite, trop large, trop fine. Quelle femme aurait dit non à Gainsbourg ?


Maintenant, me direz-vous, pourquoi cette introduction en forme d'enfonçage de portes ouvertes alors qu'on est censés parler d'un mec qui s'appelle DeeDee et non rédiger un article pour Psychologie magazine ?


Mais c'est bien simple, mon précieux. Parce que DeeDee, c'est le charme.


Le Vampire, c'est regarder les étoiles dans un velux allongé aux côtés d'une personne avec qui on n'a pas besoin de parler pour se sentir bien. Il invente des noms de constellations pour t'impressionner et tu ris parce qu'il est touchant dans sa prétentieuse maladresse. Et là, d'un coup, tu te rends compte que tu es heureuse, et que ça faisait longtemps. 


The Beast, c'est comme cette fois où tu étais rentré de soirée tout seul, et où tu t'es mis à courir sans raison particulière. Le frisson de l'ébriété, du vent qui te foutait des gifles, l'immense mélancolie mélangée à l'envie de hurler et de niquer le monde, de balancer tes baskets dans une ruelle et continuer pieds nus. Bon en vrai c'est tendu parce qu'elles t'ont coûté 80 dollz et que ta mère te tuerait, mais cette montée de liberté, ce désir puissant de t'affranchir, ils étaient bien là, et tu sais que cette force parcourra encore longtemps ton corps, comme une sève.


Les Défaillances, c'est de l'espoir, du courage en barres, un fuck massif à la lâcheté et à l'ennui en un beat doux et prenant où se posent quelques samples du Dictateur. (si je ne m'abuse)

          DeeDee, je ne te connais pas mais j'ai envie de penser que tes sons imparfaits et beaux, tu les fais dans une chambre d'étudiant en bordel. Que tu les fais pour tes potes, pour tes idoles musicales dont la moitié sont mortes ou oubliées, peut-être un peu aussi pour cette fille dans l'amphi que t'aimerais bien aborder (si je pars trop loin dans le délire teen movie arrêtez-moi).

         J'ai envie de me dire que si ça se trouve, le type normal que j'ai croisé tout à l'heure dans le bus et que j'ai à peine remarqué est peut-être lui aussi un génie ignoré qui fabrique dans sa chambre des galaxies qui n'appartiennent qu'à lui.

Voilà, en fait c'est ça le propos de mon article qui s'éparpille dans tous les sens. Continuez à créer des mondes, continuez à faire de la musique comme si vous écriviez la bande-son de la vie dont vous rêveriez. Le monde a plus que jamais besoin de vos imaginations foisonnantes, de vos sensibilités aigües, de vos créativités bouillantes.

Faites. De. L'Art. S'il vous plaît.

(Et ENVOYEZ-NOUS tout ça, bordel !)  



Rouge


 

ALIAT